_Alors il fait ses nuits ?
(aaaarrrrrhhh)
_Oui, il fait ses nuits. 😬
(Bah c’est vrai ! Il fait SES nuits)
Vous n’apprenez rien si je vous dis que le sommeil des bébés est très différent de celui de des adultes. Rajoutons que votre sommeil n’est pas celui de votre partenaire et encore moins celui de vos parents !
Le sommeil est un processus développemental et est influencé par de nombreux facteurs environnants.
Cette maturation se fait pendant les premières années de vie et les besoins en matière de sommeil progressent tout du long de cette dernière.
Les nourrissons dorment une vingtaine d’heures par jour donc ils dorment bien plus que vous ! Ce qui différencie ce sont les phases de sommeil et le rythme circadien. Ce rythme circadien qui est notre horloge interne agissant comme un chef d’orchestre et se synchronisant constamment sur l’alternance entre le jour et la nuit.
Le sommeil comporte deux phases principales :
-le sommeil paradoxal
-le sommeil non paradoxal (léger et profond)
Ces phases sont plus courtes chez les nourrissons et leur cycle très différent d’un adulte. Allant, avec sa maturation, vers des transitions entre les phases plus fluides et des cycles plus longs.
Leur cerveau prend un volume conséquent dans la première année. Le processus de connexion entre les neurones prend place pendant le sommeil, c’est pour cela que les bébés ont besoin de plus de sommeil, surtout sachant toutes les informations qu’il emmagasine dans la journée. Entre la construction du cerveau, les sécrétions hormonales, la régénération (…) on peut dire que : bébé « grandit » (sous bien des sens) pendant qu’il dort.
Il y a un fossé entre l’image du « dormir comme un bébé » et « comment les bébés dorment réellement ». Ce qui créé des attentes irréalistes et une expérience inconfortable.
Une des idées les plus répandues en rapport avec le sommeil et l’allaitement est que : si bébé ne dort pas c’est parce qu’il n’est pas repu.
C’est mal connaitre les rythmes physiologiques des bébés. C’est tout simplement la norme biologique de notre espèce.
Cette perception négative amène donc à remettre en question la qualité ou la quantité du lait maternel au lieu de se tourner vers le réel enjeu.
Cette idée malvenue s’insinue souvent au cours de la nuit du 2ème et/ou 3ème jour de bébé, la fameuse « nuit de java ».
Cette « nuit de java » est une étape physiologique qui survient quasiment chez tous les bébés allaités ou non. Elle fait partie de la programmation du comportement du nouveau-né́ humain (attachement, démarrage de la lactation, décharge, sécurité, …).
Les nouveau-nés bien portant sont très agités, sollicitent sans arrêt leur mère, ne se calment que dans ses bras, contre elle en peau à peau ou au sein. CE QUI EST GÉNIAL !
Oui, pas pour votre teint ou votre énergie, mais cette étape permet une stimulation de votre sein et donc une adaptation de votre lactation sur les chapeaux de roues.
Note : « La montée de lait » porte bien mal son nom ! Dès la naissance (et même pendant la grossesse) vous avez du lait !
Le colostrum (littéralement : le premier lait) c’est du lait PARFAITEMENT adapté aux besoins de votre bébé.
Ces pleurs du soir ne devraient pas être une indication systématique de complément ou conduire à calmer l’enfant avec une sucette (tétine).
L’expression biologique des rythmes du nouveau-né amène à avoir des tétées très rapprochées (de très courtes donnant l’impression d’avoir un bébé constamment au sein) à certains moments de la journée, notamment le soir et en début de nuit.
Ces tétées groupées sont totalement physiologiques et bénéfiques autant pour votre bébé, permettant de répondre à ses besoins de lait et de réassurance mais surtout pour votre lactation. Car ces tétées groupées répondent également à une information hormonale de votre corps : les pics de prolactine.
La prolactine est l’hormone qui régit la production et le stockage de votre lait et devinez quand est-ce qu’elle pointe le bout de son nez ?
-> Du coucher au lever du soleil !
Ce timing de stimulation est donc au poil !
Le lait maternel contient de nombreux facteurs de chrono nutrition dont un acide aminé, le L-Tryptophane, dont la particularité est d’aider votre bébé à fabriquer de la mélatonine, cette hormone naturelle qui facilite l’endormissement et la régulation des rythmes circadiens.
Le sommeil des nourrissons est donc intrinsèquement lié aux tétées, il est donc logique d’associer le sein au sommeil. La succion au sein apaise et réconforte bébé, l’aidant facilement à se calmer et se rendormir. S’il est accompagné au sommeil au sein et qu’il n’est pas encore prêt pour s’endormir autrement, la personne qui en aura la garde trouvera un autre moyen pour l’accompagner (bercements, portage, berceuses, …).
Lors de la tétée, bébé est baigné d’ocytocine (cette fameuse hormone du bien-être, du lien et de l’amour, également l’hormone qui régit l’éjection du lait) et vous aussi par la même occasion, ce qui entraine un lâcher-prise, une somnolence toute naturelle.
Chez le nourrisson, les micro-réveils sont protecteurs, ils permettent un bon contrôle physiologique et une vigilance, donnant l’occasion à bébé de téter ; ce qui est favorable à sa croissance et à la lactation de sa maman. Chaque micro-réveil n’est pas nécessairement synonyme de tétée mais ils sont une bonne occasion pour accompagner bébé dans un nouveau cycle de sommeil comme nous avons vu auparavant, nous aidant nous même à nous rendormir par la même occasion.
Rappelons également que durant les premiers mois de la vie de bébé, c’est comme s’il ne faisait qu’UN avec vous, ses cycles de sommeil sont calqués sur ceux qu’il avait dans votre ventre, d’où la difficulté de le poser dans son berceau sans occasionner de réveil intempestif. Vous l’avez sûrement remarqué, le sommeil est facilité en portage ou dans les bras.
De nombreuses études sur le sommeil du nourrisson s’appuient uniquement sur des données rapportées par les parents, en supposant que les parents déclarent avec précision les paramètres du sommeil de leur bébé.
Or les résultats d’’actigraphies (test permet d’évaluer les périodes d’éveil et de sommeil sur plusieurs jours ou plusieurs semaines) ont prouvé que les rapports maternels des mères qui nourrissent leur bébé aux préparations artificielles (contrôlant l’emplacement du sommeil du nourrisson) ont surestimé le temps total de sommeil lorsque les mères allaitantes le sous estimait.
Ces résultats soulèvent des questions sur les études précédentes au sujet du sommeil du nourrisson où l’exactitude des données sur le sommeil du nourrisson déclarées par les parents est supposée.
Aussi, La lactation est associée à une augmentation du sommeil profond chez les femmes allaitantes. Chaque tétées nocturnes entraine une libération d’un cocktail d’hormones favorisant le sommeil et la relaxation ce qui vous permet de vous rendormir plus vite, plus profondément, plus longtemps en sommeil profond (sommeil réparateur) avec plus de facilité à se réveiller afin de répondre aux besoins de bébé.
La somnolence dans la journée des femmes allaitantes n’est donc pas un signe de fatigue. Il s’agit d’un état normal, lié au rythme veille/sommeil qui est modifié par l’allaitement et qui favorise une meilleure récupération. C’est ce qui fait que les nombreux réveils nocturnes n’impactent pas la quantité totale de sommeil réparateur, à condition bien sûr de suivre les signaux que votre corps vous envoie.
Nous pouvons faciliter le processus du sommeil chez nos bébés avec des actions simples qui respecteront son rythme et le vôtre et aideront les processus physiologiques à se mettre en place.
– Exposer son bébé à la lumière en journée et limiter les lumières artificielles qu’elles soient de luminaires ou d’écrans (lumière bleue) le soir et la nuit.
Il existe des ampoules filtrantes sinon il y a l’astuce toute simple de créer ce filtre avec un linge foncé ou rouge (attention : pas directement sur l’ampoule)
-Continuer vos habitudes sonores.
Quand bébé était dans votre ventre il dormait avec tous vos bruits extérieurs et corporels. En parlant plus bas pour créer un environnement calme, continuez vos affaires. Cela peut même lui permettre de se sentir en sécurité.
-Instaurer des routines.
Cela peut être des massages, de la lecture, des bercements autour d’un chant doux, des câlins/ caresse avec un lange, tout ce qui vous fera envie. Cela permettra au réservoir affectif de votre bébé d’être remplis et surtout de faire comprendre à son système que l’heure du coucher arrive.
– Bien nourrir le bébé juste avant d’aller se coucher, c’est-à-dire généralement pendant son sommeil. Oui oui vous avez bien lu. Bébé tête en dormant !
En plus d’entretenir votre lactation, les tétées groupées répondent à tous les besoins de bébé et amènent via le lait maternel tous les facteurs facilitants son sommeil et le vôtre.
-Créez un environnement propice à son sommeil avec un endroit de sommeil et de tétées cozy.
Les tétées groupées portent bien leur nom, construisez un endroit cozy pour allaiter confortablement et vous détendre par la même occasion.
-Le laisser s’endormir et ne pas le réveiller.
Cela va de soi n’est pas ? Pourtant il peut être tentant de vouloir JUSTE changer sa couche avant qu’il s’endorme, JUSTE le mettre en pyjama pour pas qu’il dorme habiller. Dites-vous que quand le train arrive on monte dedans pour ne pas le rater.
-En parlant de train, la vraie clé pour le sommeil de bébé c’est d’arriver à capter le moment ou le train arrive.
Les signes de sommeil sont crescendo et les routines permettront d’envoyer des signes à votre bébé et votre corps que le temps de sommeil arrive, ce qui permettra une préparation naturelle facilitant la mise au repos.
Le sommeil est quelque chose d’intime et chaque individu développe ses besoins de sommeil à son rythme. Ces moments nocturnes le sont tout autant, ce sont vos moments à vous (maman/bébé/même que votre partenaire vous tient compagnie parfois) et en même temps, au même moment, des milliards de mères vivent les mêmes moments avec leur bébé. Quelquefois, discuter permet de s’alléger l’esprit, l’application est là pour vous connecter à toutes ces mères.
Et puis c’est aussi un temps que vous pouvez mettre à profit : comme mettre bébé en portage pour lire votre livre qui prenait la poussière sur votre table de chevet. Passer ce balai que vous n’arriviez pas à retrouver tellement cela faisait longtemps que vous ne l’aviez pas touché. Avec tous ces berceuse, bébé finira bien par prendre ce train et quand vous le verrez passer, prenez-le aussi, même si le balai n’est pas fini ! Il ne disparaitra pas celui-là !
PSST ! La privation de sommeil n’est pas un sujet à prendre à la légère. Les parents qui souffrent de fatigue due au manque de sommeil ont plus de risques de souffrir de trouble de l’attention, de la mémoire ou de l’humeur, de stress et d’anxiété, d’avoir des problèmes de couple, et d’avoir des accidents de la route. Il est donc bon de rappeler ceci :
Posez-vous dès que possible : Oui, ce n’est pas « dormez quand bébé dort » (même si dès que cela est possible FAITES DONC ! Mais bien posez-vous : Si vous étiez debout asseyez-vous, si vous étiez assises, étendez-vous et ainsi de suite. Puis si vous étiez allongée ou relax assez pour fermer vos yeux c’est le moment d’en profiter.
Pour finir, rechercher du soutien. Des professionnels du sommeil sont formés à la lactation humaine et l’allaitement maternel. Le réseau des Facilitatrices d’allaitement approche Apasdemoa peuvent vous fournir des contacts fiables. Osez contacter la vôtre ! (L’application en regorge 😉).
Sources
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30097331/
La lactation est associée à une augmentation du sommeil à vagues lentes chez les femmes :
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/12464097/
Le rythme circadien du tryptophane dans le lait maternel :
https://europepmc.org/article/med/16380706
L’allaitement maternel augmente la durée du sommeil des nouveaux parents :
https://journals.lww.com/jpnnjournal/Abstract/2007/07000/Breast_feeding_Increases_Sleep_Duration_of_New.8.aspx
Rythme de la mélatonine dans le lait humain :
https://academic.oup.com/jcem/article-abstract/77/3/838/2649910?redirectedFrom=fulltext
Conséquences comportementales et physiologiques de la restriction du sommeil :
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1978335/